jeudi 2 juin 2011

 
Guillaume Chaumet, 37 ans, et au cerveau éclaté par deux ans de prépas à Stan, devient maître en philosophie, et écrivain, passionné de littérature russe et latino-américaine, il publie un recueil de
nouvelles, deux romans et des articles de critique littéraire. Depuis deux ans, il commente des toiles de peintres contemporains. L’artiste ajoute au désordre du monde. L’écriture est le relais de la parole, de la voix, donc du corps. Guillaume Chaumet dit, répète, révèle sans avouer : « Vous ne saurez jamais de quel secret je pars. »
"Fumées et autres nouvelles", éd. Le Temps des Cerises, coll. Union des Ecrivains
"L'éther nocturne", éd. Lacour, FAX 0466297491
"Le Christ est mort. Vive le Christ.", éd. Lacour

Guillaume Chaumet,
21 bis, rue des Plantes,
75014, PARIS.
tél: 01 45 49 14 74
port: 06 22 59 29 26
E-mail: gchaumet@netcourrier.com



 Dominique Cros,
76, avenue Félix Faure,
75015, Paris, France .
 Tél : 33- 01 73 71 38 21
Port :        06 73 16 10 45
www.misspic.org


Dominique Cros
 Née en 1956, à Castelnaudary, elle grandit à Paris. De nature autodidacte, elle commence sa carrière à vingt ans par de menus travaux d’illustration, puis des affiches pour les groupes de rock de l’East Side à Manhattan (NYC) en 1979, et les décors télé pour la chaîne françaiseAntenne 2.  A trente ans elle quitte Paris pour le Sud et  devient
 une des premières tatoueuses exerçant en France,  dessine des modèles pour les professionnels. Cette pratique du dessin la conduit après vingt ans d’expérience vers une recherche plus libre et personnelle, sous la forme de tableaux, peinture à l’huile sur toile. Elle a un fort penchant pour les peintures de facture plutôt classique, aime la belle peinture qu'elle utilise pour aborder des thèmes modernes, des regards urbains sur notre vie de tous les jours. De retour à la capitale depuis peu, elle expose ses tableaux tous les dimanches de 10h à 19 heures au marché de la création, boulevard Edgard Quinet, à Paris-Montparnasse.Toutes ses œuvres sont visibles sur : http://www.misspic.org/

"La Flaque !" ou "Le monde à l'envers"

La flaque ou le monde à l’envers



Je réfléchis à la manière de la flaque sur ma condition d’existence et sur ce coin de ciel bleu qui m’est accordé.


Je suis immobile, statique et fier de moi comme cet immeuble, droit et intègre ; quel âge ai-je ? Mais est-ce un immeuble du XIX e ou du XX e siècle. Dans ce dernier cas, je lui suis contemporain ; beau, solide, pas mal, séduisant, que sais-je encore ? Il fait beau dans ma tête, le ciel se réjouit, bleu azur… un peu triste, parfois, comme cet arbre décharné auquel il manque les feuilles. Un nuage d’octobre qui a du mal à se cacher derrière cet arbre désincarné, rachitique, anorexique…


Le printemps me manque et je vomis mon dégoût de la pluie et de ces feuilles rousses et rouges comme cet été indien à qui je ne dis rien puisque je ne vaux rien. Le métro aquatique : je plonge ! dans un alcoolisme sans fond…


Quelques bagnoles font le trottoir alors que j’écluse le long de l’escalier roulant. Je vais à contre sens, dans le sens inverse de la vie et la vie est à moi. Rien ni même cette flaque ne me fera changer d’avis, je suis un raté comme l’était Bukowski.


                        La flaque, oui, je ne suis qu’une flaque, celle où il y a très peu d’eau et beaucoup de whisky, merci Bukowski.


Merci Dominique pour ton coup de pinceau très, très réussi qui m’a permis d’écrire sur le mode du délire et de voir ma propre pomme se refléter dans un irish-coffee.
     
                                                             G. Chaumet

Coucher de soleil


Coucher de soleil



La nuit tombe-t-elle ou le soleil se couche-t-il ?

Les poteaux télégraphiques, les lignes électriques, les pylônes, seuls survivants à la néantisation progressive de cette parcelle de vie où les nuages et le ciel ont, malgré leur teinte assombrie, le mérite de garder le jour à découvert et de laisser pénétrer un semblant de vie sur un monde de mort.

Lueur de feu dans le lointain, magie inquiétante de l’atmosphère, brillamment rendue par l’artiste, et on voit se profiler le tonnerre, et le monde humain foudroyé par la colère divine.

Les potences 4 et 5 nous impressionnent par leur immobilité spectrale et leur chant grésillant imperceptible.

Potence, oui, car nous distinguons au bas du tableau ou plutôt imaginons, autant que faire se peut, les rails d’une voie ferrée. Me tromperais-je ?... En tout cas, le monde des Cieux surplombe la vie terrestre, la vie du progrès scientifique, celle des ondes ultra rapides, et pour finir l’homme dans sa misère, celui-là même qui a voulu comprendre l’origine de la vitesse des sons.

Oh, Dieu du ciel ! Comment peux-tu nous accabler et faire de notre vie un misérable taudis en même temps qu’une humanité en perpétuel progrès ?

                                                 

                                                         3 niveaux donc :

                                      



 I     Ciel en mouvement

II  Technique de l’humain

III  Monde de la terre ferme   

 …nuisible à l’homme

   …positive et négative

   …réceptif à tout, tout…



Et oui, la vie est complexe ; s’enchevêtrent et s’entremêlent des éléments naturels et d’autres forgés par l’homme, l’homme qui regarde ce fameux coucher de soleil.

Comme dirait le philosophe Hegel dans « La phénoménologie de l’esprit » : « La chouette de Minerve ne prend son envol qu’à la tombée de la nuit. »

Ce qui signifie ici que les Dieux du ciel « analysent » et regardent l’activité humaine quand celle-ci est au repos.



Bravo Miss Cros ; tu a réussi à réunir trois éléments qui interagissent, trois éléments fondamentaux qui montre la réalité aiguë de notre vie sur Terre.

            Beau coucher de soleil…
                                                                                             G.Chaumet

Apparition


Apparition





            Où, quoi, qu’est-ce ? Quand ? Mais où sommes-nous, nom de Dieu ?

Barres de fer verticales ; d’autres, au-dessus, sont plaquées et couchées horizontalement. Des escaliers et des poutres métalliques. Des rails au premier plan, des carreaux sales dans ce qui ressemble fort à un box dans une station de RER. Il y a de quoi perdre la tête à la vue de ces innombrables « tiges et troncs » gris bleus. Des rails dont le rouge est la couleur sur laquelle repose le bleu, le gris bleu.

Le box, un semblant de vie humaine, où les couleurs sont variées. J’ajouterais même, conformément à ce qui se nomme Gestalt-Theorie (théorie de la forme dont Wolfgang Köhler est le principal représentant), qu’on pourrait y distinguer une silhouette ou tout simplement une face humaine et un œil. Produit de l’imagination de mon esprit ? Ou alors, bel et bien la réalité ?

Mais enfin, que se passe-t-il ici ? Escaliers, escaliers… mais pour aller où ? Descendre en Enfer, à l’âge du Fer, et trembler devant le manque de chair, régresser et revenir à des millions d’années en arrière ? Hein… ?

Monter ces foutus escaliers comme semble le faire quelqu’un au centre et en haut du tableau ? Et alors ? Accéder à la réalité, ne pas voir des larves et des araignées mais l’élégante et humaine reality.

Quelque chose vient rompre le silence visuel : un flash… un flash blanc s’étirant un peu partout… une photographie ou une production de mon esprit (pourtant j’ai pas fumé) ?

Je déraille à la vue de cette gare qui m’angoisse à un point inimaginable. Souvenirs ? Réminiscences ? Je ne sais pas. Je ne sais pas tout. Je ne suis pas Dieu, nom d’un chien !!

Dieu !! Dieu !! Donne-moi la clé de ce labyrinthe et dis-moi la vérité, s’il te plaît !

            C’est ainsi qu’apparaît la rame du RER. Ouf ! Je m’sens soulagé. Quelqu’un s’approche des portes d’un wagon… Enfin la réalité ! Mais peut-être est-ce une apparition ?...

            Dieu, Dieu, s’il te plaît, dis-moi la vérité, je t’en prie.



Les paroles de l’Evangile : la vérité n’est pas, seul l’être est, par conséquent, vous êtes.

            Je l’accepte et je suis...  



                                                                               G. Chaumet.

                                                                                 

Les cent pas



                                                                « Les cent pas »

                Que d’attente et d’impatience dans cet aéroport où les avions décollent ou ne décollent pas. On fait précisément « les cent pas » et on erre, comme des itinérants, du duty free à la cabine téléphonique et du bar aux toilettes pour déféquer, l’angoisse du ciel et des nuages pour certains les obligeant à vider leurs intestins.

On part ou on arrive, on traîne ses bagages ou on va les chercher sur le tapis roulant espérant qu’ils ne se sont pas égarés, en direction d’Oulan-Bator ou de Caracas.

L’animation est toujours à son comble, on marche partout et nulle part. L’enregistrement a été fait : ouf, quel soulagement, libre enfin. Y a plus qu’à attendre. Et si on allait acheter des clopes ! Du parfum aussi ! Yves Saint-Laurent, ça te dit, chéri ?! Bien sûr, mon cœur, tes désirs sont des ordres, c’est parti.

Certains sont d’une impatience extrême car, dans de pareilles circonstances, ils sont incapables de faire quoi que ce soit, lire, n’en parlons pas, fumer en dehors de l’infrastructure aéroportuaire, à la rigueur, boire deux ou trois bières pour tromper sa peur. Sa peur, oui ; car certains voyageurs ont vraiment peur de l’avion. Une peur viscérale, incontrôlable qui leur fait se ronger les ongles jusqu’à la peau et au sang.

Charles de Gaulle, Orly, c’est du pareil au même, on y va car on veut partir et une fois là-bas, on ne peut faire qu’une chose : « les cent pas ».

Pas d’alternative possible : patienter comme lorsqu’on patiente dans la salle d’attente du médecin qui ne fait que cumuler les retards.

L’obscure conscience du patient qui redoute un toucher rectal de la part d’un médecin inconnu est semblable à l’angoisse des airs, cet air qui nous porte vers des contrées dont la nouveauté fait accélérer le sang et le cœur qui joue son rôle de pompe.

Mes veines palpitent, le sang me monte à la tête : et voilà, l’embarquement pour Lomé est annoncé. Je vais enfin rejoindre mon ami Maxime, ingénieur agronome, expatrié ayant fait son mea culpa tandis que moi je finis de faire « les cent pas ».



P.-S. On retrouve ici comme ailleurs ce qui fait le charme des peintures de Dominique Cros :

La lumière ondoyante des lieux. Ici, un sol où les ocres, blancs, rouges se confondent jusqu’à donner la sensation du mouvement tandis que les voyageurs, des ombres interchangeables, sont comme figés dans l’immobilité de l’attente. Tournés vers un ciel très pâle où aucun avion n’apparaît, ils vont infiniment faire les cent pas.





                                                                                                                    G.Chaumet       

 

7 heures du mat'

« 7 h du mat ‘ »


            C’est l’heure, l’heure d’aller bosser, l’heure de commencer à gagner sa croûte, pour la famille, pour ses enfants, pour soi. Solitude avec un soupçon d’amertume et de douleur…


On fait les cent pas en attendant le prochain métro, on s’isole, on échange quelques mots dans une flaque d’eau et de soleil. Des couleurs ineffables sur le quai allant du bleu marine au turquoise en passant par du délavé sans oublier un noir foncé qui s’écoule dans un violet trempé se distillant finalement dans un jaune pâle, propriété exclusive d’un timide rayon de soleil.


Les voyageurs se tiennent debout face aux rails transversaux ; certains, « perpendiculaires » aux sens des rames de métro, guettent le panneau d’affichage, impatients de quitter, dans leur tête, cet abominable « 7 h du mat’»…


Les éléments constitutifs de cette gare (hormis les hommes) sont rectilignes, droits et à angles droits. Que ce soit sur le quai, balustrade pour l’escalier, ligne grumeleuse, blanche, rose et bleue à ne pas dépasser, ou sur le toit, fait de poutres en fer qui soutiennent l’abri du métro aérien, tout est « carré »  pour des hommes qui se trouvent encore dans les brumes du sommeil et dans le vague du boulot.


Le métro arrive : patience, patience pour ceux qui sont sur le quai d’en face, on ne saurait douter de la même chose dans l’autre sens.


            La question du sens, sense, way, meaning me semble important dans cette étude que Dominique Cros a réalisée en un seul coup d’œil.


-          Sense, le sens inné du « croqué sur le vif », de la vie matinale ;


-         Way, la rame, le boulot, la direction et la pente ascendante (ou descendante) qu’empruntent les voyageurs… ;


-         Meaning, le sens de tout ça, pourquoi la vie ? Pourquoi « 7 h du mat’ »… ?





    Enfin, si je puis dire : pourquoi quelque chose plutôt  que le néant ?





                                                                                                         G. Chaumet

On y danse sous le pont


La mort de l’homme




            L’artiste Dominique Cros nous donne à voir par le biais de la peinture la modernisation intégrale du monde.

Un tunnel routier, des voitures qui, en dessous, prolifèrent. Garées ou faisant du pare-chocs contre pare-chocs, elles traduisent l’acier fou, le métal et les métaux de ce début de siècle où la voix est celle du cri grinçant des pneus sur la chaussée, où la loi est celle de l’énergie pétrolière, gaz d’échappement asphyxiant ce qui reste de l’homme, les êtres humains dans ce tunnel n’étant plus que les ombres d’eux-mêmes, sachant que l’opium en Afghanistan fait exactement la même chose sur les hommes qui sont à la dérive ; homme, chair, cela n’existe plus, seul le conducteur de la force motrice – où est-il, Dominique ( ?! ) – existe encore pour que la machine puisse encore exister.

Un bowling indiqué : celui de l’an 2050 où la machine avale les quilles et la boule qui doit absolument prendre le chemin de la victoire comme l’automobiliste doit être le premier à démarrer au feu vert.

Les panneaux de signalisation, sens interdit et autres signifient la mort de l’homme au même titre que Foucault le disait avec une nuance propre à savoir que « l’homme était un concept voire une idée qui disparaissait d’elle-même ».

Barres de fer transversales au-dessus des têtes (ou plutôt des toits des voitures) les une perpendiculaires aux autres, lumières ou plutôt néons connotent dans, cette remarquable peinture de l’artiste peintre Dominique, une implacable lucidité, celle de la définitive disparition de l’homme et l’avènement de « l’acier ».

            Belle œuvre, très, très belle œuvre picturale, à message explicite qui nous fait frémir.



                                                                                             

                                                                                           G. Chaumet

Carrément

                                                « Carrément »

                                                                                                          

    Compte tenu du tracé routier : flaque d’eau ou plaque neigeuse sous le tunnel,  route verglacée avant l’entrée dans le tunnel, tout porte à croire que nous sommes en hiver et que les bagnoles trouvent ça carrément emmerdant.

Arbres sans feuilles, brrr, il fait un froid de canard.

Voitures à l’arrêt dans un couloir détrempé à sens unique. Passage clouté où aucune âme n’ose s’aventurer. On aperçoit tout de même deux ou trois voitures semblant s’avancer à leurs risques et périls.

  

     Carré rectangulaire, donc non parfait, ce qui symbolise le mécontentement des automobilistes voulant jouir de leurs droits en le clamant haut et fort dans le tribunal où le temps occupe le statut du procureur I de la République.

Les témoins II, vous, moi et les autres. L’accusé III : le temps (qui fait donc double office), la météorologie, le climat occidental…



Morte saison. Couloir de la mort. Les caisses arrêtées sur le côté droit du sens de la circulation ont toutes un aspect plus ou moins carré. Elles en ont d’ailleurs carrément marre de cet hiver qui n’en finit plus et de cette « putain de route » qui les oblige à rouler au pas comme lors d’une procession funèbre.

Les automobilistes réclament leurs droits, celui de rouler. Mais, manifestement, le temps, peu engageant, vient à l’encontre de ces droits et tient la place juridique prééminente.                           

  Le procès intenté au temps, qui dura deux mois, fut, à mon sens, perdu. Car nous ne sommes pas en mesure d’avoir une prise sur les éléments naturels lorsque ceux-ci obéissent à leur logique.

C’est carrément dommage car j’avais besoin de ma caisse pour acheter le pain…

                                                                                     G. Chaumet                                           
                                                                                                                              

                                                                                             

                                                  

La vie en 4D


« La vie en 4 D »



            J’ai fumé trois joints de drogue et j’entends les bruits en trois dimensions, génial !

Je suis ingénieur à Air France et mon Q. I. me fait voir la piste de décollage en quatre dimensions. C’est ça la science, le progrès, les nouvelles technologies ! On voit tout et on peut tout faire. Mais il y a des limites tout de même ! Ou bien j’ai bu un verre de trop à l’anniversaire de l’hôtesse de l’air, la divine Sylvie ou bien je suis en proie à un délire pathologique qui nous conduira l’équipage, les passagers et moi vers une catastrophe naturelle puisque maintenant les 4 D font office de norme humaine et mondiale.

Où va-t-on ? Je me le demande. Remarquez, l’avantage d’avoir quatre tableaux de bord qui s’offrent à mes deux yeux me permettent de disposer d’un panorama de la situation terrestre et aérienne unique ou peut-être universelle.

Est-ce moi seulement ou l’humanité entière qui bénéficie ou supporte la vie en 4 D ?

Peu importe. Le boulot avant tout. Vérifications de dernières minutes, voilà… moteurs à réactions visuellement enclenchés et bien disposés… l’équipage est au complet mais qui est ce co-pilote ? Jamais vu. Ou plutôt jamais entendu, triplement entendu. Mais putain, j’ai fumé un joint ou quoi ? Sans m’en apercevoir alors.

C’est ça, c’est exactement ça. L’homme ne s’appartient plus, le progrès le dépasse comme la transcendance gouverne le fumeur de pétards. La transcendance est là, bien là et le pilote doit faire avec. Avec les un, deux, trois co-pilotes, même si l’on ne sait plus à quel saint se vouer, il faut décoller, nom de Dieu !

            Après les trois dimensions courantes et bien acceptées par les Français, il nous faudra faire éternellement avec « la vie en 4 D », éternellement oui car je viens, moi, ingénieur dans l’aviation, sorti premier de l’ENSAE ( Ecole Nationale Supérieure de l’Aéronautique et de l’Espace ), puis pilote de ligne professionnelle, je viens, oui, de m’écraser contre un ciel en béton, le quatrième, juste après le cumulus aux protubérances arrondies au sommet.

Je ne sais que dire. D’ailleurs, je ne peux plus rien dire.

            Me voilà mort et enterré dans un cercueil en 4 D.



                                                                                    G. Chaumet
                                                                                                              ( qui réfléchit déjà en 4 D ). 

La sieste



Dominique Cros nous fait entrer ici dans le domaine des songes et de l’inconscient.

Une petite fille dort paisiblement, posant sa tête inclinée contre la fenêtre du wagon d’un métro, d’un RER, d’un train de banlieue, que sais-je encore, contre la fenêtre d’un wagon qui se dirige vers les étoiles.

Mignonne, à quoi rêves-tu ? Au magicien d’Oz, à la belle, bien plus puissante et rayonnante que la bête, à ta grand-mère de quatre-vingt-dix ans ? Baignée dans le silence du terminus de ce « train » tu nous pousses à voir en toi la sérénité et la profonde sagesse des « anciens ». Rien, non rien ne peut nous empêcher de voir en toi l’angélisme de la profondeur…

D’où viens-tu, belle petite fille inconnue ? Tu le sais mais tu le noies au contact de la clé des songes, cette clé à jamais ta propriété. Tu nous provoques même, les yeux fermés derrière tes lunettes, Angélique au visage reposé !! Tu nous abandonnes, nous qui courrons comme des dératés dans les couloirs du métro parisien, tu nous laisses à nous-mêmes dans les escalators, dans leurs odeurs de sueur et d’urine.

La beauté du somme, toi seule sais le goûter. Tu ignores notre face de « petites gens » et tu t’élèves, ton âme s’élève au-dessus de la médiocrité parisienne.

Pas de brouhaha, seulement une haleine périodiquement fraîche d’où émane la pureté d’une petite fille qui s’en est allée voir les ombres et les étoiles d’un monde à nos yeux caché.

                        Dors, dors, ma douce, le ciel te conduira là où nous ne serons jamais que des anonymes, des spectres de la foule, des individus lambda.  

                                                                                                



                                                                                                                                                                            G. Chaumet

Gare à toi !




Gare à toi !




Gare à toi, Ô voyageur qui ne sait où aller. Tu es, comme tu le dis toi-même, voué à te déplacer. Nomade de constitution, tu ne tiens pas en place. Tu veux toujours aller ailleurs en partant d’ici. Et quand l’ailleurs devient ici, tu te déplaces afin d’aller ailleurs. Cheminement infernal qui te conduit à monter ou bien à descendre les escaliers, avec ou sans escalators. Les sacs, les valises, quelle plaie : Château de Vincennes, ligne 1. Je te l’avais dis, Ô voyageur invétéré, tu pensais découvrir le monde mais c’est en fait le monde souterrain qui te tiens entre ses mains. Tu pensais trouver le Parthénon ou le Colisée mais en fait il n’y a que le RER et la ligne B. Les gonds se resserrent sur ton frêle corps et tu ne sais pas comment t’en détacher. Pris au piège par la technicité moderne, tu ne fais que parcourir les chemins de la RATP.

Gare à toi, Ô voyageur ! Je te l’avais dit ! Tu ne passes pas par les chemins du sans souci.

Il y avait plus simple. Néanmoins, te voilà. Toi comme les autres, marche par marche, automatique ou mécanique. Tu veux t’échapper de ce monde que tu vomis par les naseaux, prends la sortie boulevard Diderot.

Gare à toi, Ô voyageur, de la banlieue nord ! Tu voulais imiter certains de tes contemporains qui ont la fibre du sempiternel déplacement. Non, non, crois-moi tu ferais mieux de rester chez toi. Tu es fatigué. Dors. Dors et ne pense plus à ça. Le cauchemar de la vie on ne peut plus moderne : les uns derrière les autres, on fait la queue les uns derrière les autres.

Prends garde, Ô voyageur infortuné !  Tu ne l’as certes pas fait exprès mais tu es un numéro, un numéro comme tout le monde, numéro 3 derrière le monsieur au journal.

La Sardaigne ne t’accueillera pas dans ses bras et surtout ne bouge pas, je prends la photo des marches qui mènent à la ligne A.



                                   Gare à toi, voyageur, gare à toi car jamais tu ne t’échapperas.



                                                            G.Chaumet
                                                                                                                            















« Immeubles en caisse »





J’habite au premier étage de cet immeuble. Là, là, tu vois ; approche-toi, là, dans le pare-brise, tu vois ta tête de con, et bien c’est là que j’ai établi mon domicile.

Le capot nous renvoie l’image d’un immeuble… de quatre étages ? Je ne suis pas sûr en effet. Ce monde d’images et de reflets, c’est le monde occidental de la lumière, celui qui se voile la face et perd la boule.

                        Le culte de l’image attise la haine des islamistes. Mais oui, souvenez-vous, le grandiose et fantastique feu d’artifice du 11 septembre 2001. Le fameux Ben Laden voulait mettre un terme à l’image :          

                                                            Allāh akbar !!



Il crut y mettre fin et, sur toutes les chaînes de télévision du monde, l’image fut montrée.                                             



L’existence terrestre, la planète, les hommes, pro-iraniens ou pas, sont devenus complètement dingues, ils déforment le monde en attaquant les Etats-Unis au cutter. C’est avec un essuie-glace que nous vous montrons comment balayer la cour d’un immeuble et, en un clin d’œil, comment refléter le cœur de pierre de ces hommes, de ces femmes, fanatiques le plus souvent, qui s’adonnent à des prises d’otages. Ainsi les « caisses » nous donnent à voir un monde fou et à l’envers.

Le bleu prédomine sur cette toile qui en dit long, long, très long sur la réflexion de ces immeubles auxquels il manque la vie. La réflexivité mathématique du capot est la même, géométriquement parlant, que celle du pare-brise.

Combien d’étages, au fait ? Quatre ? Cinq ? Un essuie-glace qui en donne un de plus…



            Où est la réalité ? En face ou derrière ? Au-dessus ou en bas de ce ciel d’un bleu allant du turquoise au bleu marine ?

Fiction, réalité, déraison, je ne sais plus où je suis ni qui je suis. Tant pis ou tant mieux…

                                                    G.Chaumet






                                                                                      -    Le monde est à l’envers !

                                                                                      -    Et alors !



     

Résurection


Le Christ pète les plombs


         

Le Fils de l’homme et la poussière d’étincelles qui le recouvre et le transcende en guitariste de la mort ainsi que la résurrection nous font oublier qu’Il a porté sur son dos la croix de tous les fardeaux.




L’espace étincelant où il règne maintenant, l’éjaculation de l’Univers, dépassent l’entendement. Ô palais divins où se reflète le sperme de la jouissance suprême, suc de la fertilité qui fait renaître un Dylan hurlant la fin des temps. Ton linceul sur l’épaule droite : un semblant de cuir noir.


Chante, chante, hurle, vocifère, clame ta joie et ton bonheur d’être non pas sur terre mais dans l’univers, ce palais sans fin qui t’accorde le droit d’être entouré d’un boa, molécule d’ADN bleue qui, après analyse biochimique, révèle la substance de ton corps : être profondément singulier qui renaît à la surface du globe, me dit-on, alors qu’en fait c’est la cocaïne qui te fait toucher du doigt l’espace et la voie lactée.


Artiste du rock, artiste de la cocaïne, artiste des temps nouveaux, ceux des crucifiés de la guitare.


Au bas de l’ADN se trouve le mystère et la vérité de ta résurrection, Bob, les molécules chimiques se tenant les unes les autres pour faire de toi, ô Christ de la mort, le phénomène type de la résurgence dans un autre monde, celui des hippies ? Celui de la grâce, celui de la beauté de l’imaginaire pur, du blasphème et de la subversion.


                                   G. Chaumet